Site d’informations culturelles de La Réunion

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Le JIR du jeudi 28 mai a publié un réquisitoire contre les gilets jaunes des Azalées du Tampon. Un éditorial accablant sur la façon d’accueillir les journalistes qui veulent faire leur travail, des témoignages du voisinage tous à charge, l’évocation de loi condamnant les gilets jaunes, etc., etc,
Nous n’allons pas nous attarder sur tout cela, les inexactitudes, les partis pris, la stigmatisation, ingrédients d’une campagne, d’une campagne, en l’occurrence, contre les gilets jaunes des Azalées. Cet article est ce que l’on appelle, dans le langage moderne, de « la communication ». Il n’y a pas de place dans le genre, à l’analyse exhaustive et à l’information complète.
Le phénomène gilets jaunes, en particulier l’exemple des gilets jaunes des Azalées, mérite autre chose. On comprend ceux que cela gênerait s’ils existent (sans que l’on sache, d’ailleurs pourquoi). Car enfin, et cela est vrai, les gilets jaunes des Azalées et d’ailleurs, je parle des vrais gilets jaunes[1], ils occupent, symboliquement, une place qu’on leur refuse ou une place qu’on leur a prise par des moyens douteux.
Quand on connaît les histoires des hommes et des femmes qui occupent des endroits comme les Azalées, on constate qu’en effet, on leur a dit, un jour, que dans notre pays ils n’avaient pas de place. Ils ont été expropriés de leur terre ; on les a spoliés alors que leur entreprise était saine ; ils n’ont pas pu obtenir le morceau de terre qui leur aurait permis de produire (alors qu’il existe des dispositions légales pour répondre à cette demande). Certains, parmi eux, sont là par solidarité. Derrière ces hommes et ces femmes, il y a un passé concret. Il doit être clair pour tout le monde, que l’occupation du rond-point des Azalées est le moyen, et un moyen pacifique, de faire savoir que les droits de ces gens n’ont pas été respectés ni défendus. Ils ont pris les moyens extraordinaires mais légitimes, encore une fois, pacifiques, de se faire entendre.
Aux Azalées, dans leur dénuement, ils essaient de planter ce qu’ils mangent ; ils viennent en aide aux déshérités du monde de la faim (cela existe chez nous !) ; ils interviennent pour aider ceux qui s’adressent à eux pour leurs démarches ; ils manifestent aussi contre les prédateurs de tous genres. Comment quelqu’un d’informé, qui plus est, a pour mission d’informer, peut-il nier cela ? On ne peut pas traiter à la légère le cas des gilets jaunes des Azalées et d’ailleurs.
Ce problème de l’élimination, aujourd’hui, ne touche plus seulement les publics de la cour et des classes moyennes. Il concerne, petit à petit et de plus en plus, des familles de la varangue. Des enseignes importantes de chez nous, disparaissent. D’autres, aujourd’hui-même, sont menacées. La pandémie en cours, a révélé un mouvement local en faveur de la diversité des rôles de chacun : « chacun a un rôle à jouer », selon un slogan qui fleurit sur nos écrans. Dans le commerce, puisque nous y sommes, il y a de la place pour la grande distribution, pour le commerce de proximité, pour le commerce en ligne, pour la vente directe du producteur au vendeur, pour la culture personnelle. Il doit avoir de la place pour tout le monde. Dans le domaine de la production, il faut compter sur l’effort de consommer ce que nous produisons, de produire ce que nous consommons. Nous avons entendu la publicité d’une grande enseigne nationale, pour favoriser la production locale.
Il semblerait que la société ait tendance à tourner le dos aux concentrations, aux monopolisations, aux délocalisations, aux financiarisations. À La Réunion, l’actualité économique nous montre que les prédateurs créoles de leurs compatriotes par le passé, sont dépossédés à leur tour par plus puissants qu’eux, venus de l’extérieur. Ce phénomène n’est pas particulier à La Réunion, il est mondial. Qui peut dire quelles sont les entreprises du 4/40, encore françaises selon les critères de « la mondialisation » capitaliste actuelle ?
Les gilets jaunes des Azalées, comme leurs camarades d’ailleurs, sont une expression, parmi d’autres, de la résistance à cette absorption des plus petits que soi. C’est le sens de l’espace qu’ils occupent. Des édiles leur ont offert quelques « facilités », en attendant. Ce qui est attendu, c’est la remise des compteurs à zéro. Ce jour-là, il faudra bien que les gilets jaunes soient présents. Ce mouvement attend la profession de foi collective, massive et publique des Réunionnais pour cette société dans laquelle chacun aura sa place, y compris les gilets jaunes, y compris les gens de la varangue, des classes moyennes et de la cour. S’agissant des gilets jaunes, cette remise à zéro ne pourra pas se faire sans réparations. Autant le dire tout de suite. Pour les victimes, ces réparations devront être justes, cela est incontournable, et pourraient être « humaines » pour les prédateurs.
Tout ceci pour dire que la condamnation des vrais gilets jaunes (ceux des Azalées le sont), n’est pas de mise, si l’on veut rester dans l’information ; elle n’est pas constructive si l’on veut que tout le monde, ici, ait sa place. Quel qu’ait été le passé, à la condition qu’il y ait réparations, le choix de « la construction » doit être le bon choix.
Paul HOARAU
[1] Comme dans tout mouvement de cette ampleur, il y a des « infiltrés ». S’agissant des gilets jaunes on a vu des « casseurs » et des « espions ». Ils ne sont pas gilets jaunes.
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